CÉLINE BERNARD

BERNARD (Céline)

BERNARD (Céline)

Son (ses) livre(s) publiés chez JFE :

lhommequicourtaveclesyeuxdesautres

 

 

 

 

 

 

 

Quelques mots sur l’auteur…
Céline Bernard est née en 1972, à Mâcon. Perpétuelle étudiante, férue de grammaires, enseignante de lettres, documentaliste et écrivain personnel, elle met sa plume au service d’auteurs en puissance, qui vivent leur passion avec intensité. Les biographies qu’elle choisit de transcrire révèlent des destins uniques, captivants et trop souvent méconnus.

Autoportrait…
Certains noms semblent prédestinés à briller plus que d’autres. Certains ont même tant de noblesse qu’ils semblent propulser de facto leur propriétaire sous les feux de la rampe. Artistes, célébrités, hommes politiques le savent pertinemment : la signature porte déjà une belle autorité.
De mon côté, rien de tout cela. Mon nom passe-partout me prédestinait surtout à être comme les autres. De mon enfance, je retiens les heures immobiles, couchée dans les allées sablonneuses d’un potager résidentiel, ou encore sur le canapé crapaud du salon, avec un livre de la bibliothèque verte.  J’étais sage comme une image ce qui me valait les félicitations familiales. Je lisais en liberté ce qui me tombait dans les mains, y compris quelques Reader’s Digest qu’on aurait probablement interdits si on s’était penché sur leur propos. Je m’en rendais suffisamment compte pour les garder secrets. La bibliothèque (plus exactement le Cdi) du collège m’a fait monter d’un cran. Classiques et moins classiques : Pearl Buck et Bernard Clavel, Mérimée et Balzac, contes de belles régions de France, livres recommandés par les Instructions officielles, coups de cœur des professeurs : boulimique littéraire, j’occultais invariablement le dénouement des intrigues, peut-être pour maintenir intact le plaisir de relire. J’étais un modèle facile. Rebelote pour les louanges collégiales. Au lycée, je me suis retrouvée comme en suspens. Toujours un livre en poche, je le feuilletais à tout propos : il me servait d’éventail, de bouclier, d’étendard, de manifeste ou de refuge, selon les cas. Solitaire romantique, j’ai plané au-dessus de siècles révolus, ne trouvant pas grand attrait à vivre mon présent. J’ai fui dans les histoires, de préférence poétiques, antiques et tragiques : Rimbaud, Sophocle, Virgile et Homère dans un désordre gourmand. J’ai grandi dans cette métaphore de la réalité. J’ai vécu dans les livres, pendant que le destin suivait son cours, avec des hauts et des bas, occasions d’écritures inachevées, perdues ou offertes sitôt que composées.
Jusqu’au jour où, par hasard, le mouvement s’est inversé. Sensible à la tessiture discursive, j’ai commencé à noter les particularités stylistiques individuelles. En un mot, je cherchais dans les mots entendus des découvertes phonétiques, de surprenantes alchimies verbales, de nouveaux alliages grammaticaux, autant d’authentiques trésors du français, souvent négligés par manque d’attention. L’effet a été immédiat : les gens se sont mis à me raconter leur(s) histoire(s), dans la rue, dans le métro, devant un café ou au débotté. Nous avons ri, nous avons pleuré : j’étais un miroir d’états d’âme. Voilà comment j’ai trouvé ma voix, ou plutôt ma voie. Un pseudonyme me serait désormais inutile. J’écris au nom des autres, avec les mots qu’ils me donnent, dans une lecture expressive de leur parcours de vie uniques et témoins d’humanité.
Comme quoi, la frontière entre auteurs et lecteurs n’est pas forcément là où on la croit.

 

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